Ah, les bavards aux yeux hallucinés, presque effrayants, qui te fixent sans pour autant te voir ! Qui jasent du monde dans une cacophonie de ruche. Ils viennent et ils passent, mais le silence derrière eux reste ouateux. Il faudra attendre des heures avant qu’il ne redevienne air obscur ou granite — et que la question ne s’y installe à nouveau, tacite et implacable.
— Ce que dit un bavard, écrit Alain Freudiger, n’a aucune importance. Tel discourra sur son engagement professionnel, telle documentera en long et en large son indignation face à ses voisins. Mais au fond, leur propos est parfaitement secondaire, écrasé qu’il est par le flux de la parole elle-même. Le bavardage n’est pas un bloc massif présent une fois pour toutes, qu’on peut à la rigueur ignorer, mais un flot toujours encore à nouveau là.