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/le poème dont tu es le héros
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sang

Dès la cinquième semaine depuis la conception d’un fœtus humain, un cœur primitif se forme et commence à pomper du sang dépourvu d’oxygène, car les poumons, bien que là, ne respirent point. Sans souffle et sans voix, tu t’apprêtais à être dans le silence. Enrobé de ton placenta dont les parois absorbaient le sang riche en oxygène de ta mère, tu vivais par le cordon de ton nombril. Le sang maternel rejoint le cœur du fœtus par la veine cave et s’y mélange au sien. Ainsi le sang vient de ta mère. 

À la naissance, le canal artériel et le foramen ovale — deux structures qui permettaient au sang de contourner tes poumons pendant la vie fœtale — se referment, suite à quoi il ne circule plus qu’en toi. En naissant, tu cries et puis te replies sur toi et deviens ton propre cycle. 

Avant toi, il y eut des bêtes. Le sang coulait au Cambrien, déjà, il y a 500 millions d’années, dans les étroites veines des vers et des mollusques marins. Avant eux, les nutriments et l’oxygène traversaient seulement le corps des animaux par simple diffusion. Ainsi, le sang vient de la mer. 

Le sang n’advient que par la mise en circulation d’une part liquide du monde à l’intérieur d’un animal. Le sang, c’est cette part du monde qui circule dans le repli du soi. Le sang, c’est la forme liquide de l’âme. Confiné à l’intérieur d’un circuit de veines, il irrigue le corps qui s’anime. Lorsqu’il s’épanche, il reprend à son compte le mouvement du corps, qui s’immobilise, et le sang s’imprime pour toujours l’ici.

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