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Loin de nous, dans nos abîmes, palpitent les atavismes enfouis de nos vies animales.
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Pressés par l’originalisme, nous nous voulons auteurs, nous nous devons de l’être, pour être qui que ce soit. Nous ne savons même plus nous contenter de puiser nos images, nos textes, nos sons, et nos rêves dans des atavismes millénaires, ainsi que cela se faisait chez les anciens.
Car on en serait choqué : à quelques personnages secondaires près, l’oeuvre de Shakespeare n’est qu’une série de variations sur de vieilles légendes. Horace Warpole « crée » la serendipity sur la base d’un conte de Michele Tramezziano, pris chez Christophero Armeno qui l’avait traduit en italien de la version persane d’Amir Khusro. Brahms « vole » sa Première de la Neuvième de Beethoven. Nous crions au scandale.
Nous ne serons plus jamais Shakespeare : nous ne savons plus nous contenter de chevaucher ensemble les mêmes mythes. Désarçonnés errants, inventifs à souhait, nos paroles nourrissent des bulles au-dessus de nos têtes, qui éclatent aussitôt, sans que nous nous en souciions…
…mais peut-être est-ce mieux ainsi. Les plus sanglantes scènes de l’histoire ont été jouées par les masses unies dans leur destin, courant comme des bisons dans le canyon d’une hystérie commune.
cf. plagiat