Il est bien sûr possible de trouver de la poésie dans la corrida ou dans un combat de chiens. Peut-être même dans la guerre. Au Moyen-Âge, un village français a loué un condamné à mort à une autre ville parce que les gens se plaignaient de n’avoir pu jouir depuis trop longtemps du spectacle d’une exécution publique.
Que cela soit dit : la mort, comme le désir et comme le doute, n’est pas un spectacle, mais un destin. La mort réelle demande, afin de ne pas être immonde, un degré de réalité impossible à combler au sein d’une arène, où la distance amusée du spectateur ne se traduit systématiquement qu’en absence stérile et abjecte, face à la présence infinie des acteurs.
L’arène n’a de sens qu’en présence du public. L’humain libéré de ses dieux n’a plus besoin de tuer son prochain pour amuser qui que ce soit. Son point de vue converge avec lui-même. Le regard est incarné dans son propre corps. La métaphore d’un monde comme arène ne tient plus. Pourtant, l’arène des anciens laisse encore son empreinte sordide sur notre manière d’imaginer notre cohabitation. Nous continuons à vivre pour quelque chose que nous ne sommes pas.